Étiquette : Azawad

Menaces contre les civils de l’Azawad

L’État malien renoue avec ses pratiques génocidaires et s’acharne sur les populations touarègues et maures.

La voix brisée d’un homme touareg entendue sur les réseaux sociaux il y a plusieurs jours hante l’esprit. Cet homme s’exprime dans la belle langue tamashaq, pleine de rondeurs et de douceurs. Mais son récit est rude. Lui-même est-il encore vivant ?
Sa parole retrace le contexte politique qui depuis sa jeunesse en 1990 a rythmé sa vie au Mali : les revendications socio-politiques des Touaregs, les violences de l’armée malienne contre les habitants, le refus total du gouvernement à prendre en compte les droits citoyens de la population du nord, les luttes armées, le sacrifice des jeunes gens, les milices contre-insurrectionnelles semant la terreur parmi les civils, l’exil de milliers de familles pour échapper aux tueries, les camps de réfugiés, la misère, les traités de paix successifs entre les fronts armés touaregs et l’État malien désireux surtout d’arrêter les combats que perd son armée en fuite sur le terrain militaire. Dès la trêve obtenue, les dirigeants politiques arment et encadrent des milices paramilitaires qui assassinent les teints « rouges », civils touaregs et maures vulnérables (femmes, enfants, vieillards). Avec la complicité active ou passive des militaires, ils brûlent les campements et les maisons, pillent, terrorisent et tuent des centaines de civils [1]. Les survivants affluent en masse dans les camps de réfugiés en Mauritanie, en Algérie et au Burkina Faso.
Un scénario brutal et répétitif jusqu’au dernier traité de paix, celui de 2015 signé à Alger sous l’égide de la communauté internationale. Bien que le cadre de cet Accord soit limité – mesures de décentralisation et intégration, dans l’armée « nationale », des combattants issus des groupes armés signataires de l’Accord – les autorités maliennes ont freiné son application, jamais achevée, comme ce fut le cas pour les précédents accords.

Le 24 mai 2021 au Mali, un nouveau coup d’État remplace celui qui avait renversé le président Ibrahim Boubakar Keïta neuf mois plus tôt. Assimi Goïta, un colonel putschiste récidiviste, prend la tête de la junte. Après avoir chassé l’armée française et les forces onusiennes internationales (MINUSMA) installées au Mali dans le cadre de « la lutte anti-terroriste », après avoir repoussé le calendrier des élections présidentielles au grand dam de la communauté internationale, ainsi que d’acteurs de la société civile malienne ou des partis politiques, le colonel annonce un coup de force au nom de la « sécurité ».
L’armée malienne va-t-elle enfin affronter et endiguer l’avancée des groupes jihadistes (sous l’obédience de l’État islamique et d’Aqmi) qui malmènent et terrorisent depuis 20 ans la population du nord, d’autant qu’ils ont aujourd’hui étendu leur emprise jusqu’à quelques kilomètres de la capitale Bamako ?
Dans le centre du Mali l’armée se livre à plusieurs massacres concernant en majorité des civils peuls confondus avec les jihadistes [2]. Au nord, ce n’est pas la menace islamiste qui semble préoccuper le régime de transition malien mais les autonomistes de l’Azawad. En attaquant ces derniers à Ber les 11 et 12 août 2023, Goïta rompt unilatéralement l’Accord de paix et de Réconciliation, parrainé par l’Algérie depuis 2015 avec le soutien de la communauté internationale et de l’ONU. Il transforme ses partenaires du nord en « terroristes », entretenant la confusion entre autonomistes et jihadistes également présents dans la région et en relations conflictuelles. Le gros mot est lancé et le permis de tuer instauré [3]. Mais Goïta ne part pas lui-même au combat. Il préfère embaucher une force étrangère, les mercenaires russes Wagner, payés à grands frais sur les caisses de l’État [4] au détriment des Maliens dont la majorité écrasante vit en dessous du seuil de pauvreté. En s’appuyant sur cette unité paramilitaire russe, connue pour ses sordides exactions contre les civils [5], l’objectif de la junte se précise : il s’agit de liquider non seulement la question politique de l’Azawad, mais sa population.
La médiation internationale menée par l’Algérie pour le suivi de l’accord de paix reste muette. Pire, les avions qui renflouent l’armée malienne avec les effectifs de la milice Wagner et les armes russes (dont des drones achetés à la Turquie) transitent par l’Algérie. A qui s’attaquent les troupes régulières et les mercenaires auxiliaires de l’État malien ? Selon un scénario récurrent, ces colonnes s’en prennent aux civils innocents qui ne peuvent se défendre, ils les éliminent, s’accaparent de leurs modestes biens et brûlent leurs villages ou leurs campements pour faire fuir les survivants. Rien ne stoppe la violence extrême des militaires maliens et de leurs alliés russes dont les méthodes d’assassinat par égorgement (pratiquées dès mars 2022 contre les villageois peuls de Moura au centre du Mali) sont identiques à celles de l’État islamique.
Le 2 octobre 2023, une lourde colonne malienne de 100 chars et véhicules blindés part de Gao en direction de Kidal. Elle atteint Anefif à 100 km de Kidal. Le village est déserté par ses habitants qui connaissent les pratiques d’exécution sommaire des militaires maliens appuyés par les miliciens russes. Encerclés par les combattants touaregs et faute de pouvoir s’approcher de Kidal, l’armée malienne et ses alliés russes usent de drones tueurs. Le mardi 7 novembre 2023, ils bombardent Kidal à trois reprises. La base de la Minusma que les Casques bleus viennent de quitter et deux autres cibles civiles dont une école sont atteintes. On dénombre plusieurs morts, selon les chiffres de la Coordination des Mouvements de l’Azawad [6] huit enfants et six hommes, ainsi que de nombreux blessés. Les combats qui s’engagent avec les groupes touaregs de l’Azawad quand la colonne Fama-Wagner tente d’atteindre Kidal sont violents. La presse malienne parle de « percée » tandis que du côté touareg on relève des mouvements de débandade parmi les militaires maliens et leurs mercenaires russes. Ces derniers bombardent aveuglément Kidal que les habitants pris au piège tentent de fuir. Le 14 novembre, l’armée malienne et ses supplétifs russes entrent dans Kidal.
La junte a-t-elle atteint son objectif de « restaurer la souveraineté de l’État sur l’ensemble du territoire national » sans intégrer dans ses troupes les combattants issus des groupes armés signataires de l’Accord d’Alger ? Sur le plan militaire, l’asymétrie des armes ne laissait prévoir que cette issue au profit de l’armée malienne et de la milice russe lourdement équipées et dotées d’une force aérienne conséquente [7].
Par contre, sur le plan socio-politique, la réactivation de l’option génocidaire du système malien (déjà mise en œuvre à de nombreuses reprises) est certainement la plus contre-productive qu’il soit pour l’avenir de cet État. Rappelons qu’en 1963, lorsque surgit le premier soulèvement des Touaregs de l’Adagh contre le nouveau dispositif frontalier entre Mali et Algérie qui ampute leurs parcours nomades et les sépare de l’Ahaggar, l’armée malienne se livre à une répression atroce contre les civils, endeuillant et traumatisant les familles sur plusieurs générations. Cette violence disproportionnée de l’État malien va fabriquer les « rebelles » de demain. Loin d’être circonstancielle, cette méthode de gestion des conflits politiques par la terreur semble structurelle, probablement nécessaire au fonctionnement même de cet État. Car depuis 60 ans d’indépendance, le gouvernement malien s’est montré incapable de restaurer la confiance au nord et de se constituer en ensemble national intégrant chaque pan de sa population. La corruption des dirigeants, la faillite des services publics, la paupérisation des habitants, la crise économique endémique, l’autoritarisme et l’idéologie héritée de la colonisation ont été corrélés à une propagande d’État qui a transformé toute contestation politique en guerre de races, d’ethnies ou de tribus. Orienter la colère et la frustration sociale vers un bouc émissaire : le nord, les nomades (Touaregs, Peuls, Maures), les éleveurs, les teints clairs… a servi à faire oublier la responsabilité des dirigeants dans la faillite de l’État.
Depuis la colonisation, le vaste espace d’échanges et de circulation qu’étaient le Sahara et ses franges sahéliennes n’a cessé de se rétrécir comme peau de chagrin. Découpé, amputé, recouvert de lignes frontières, appauvri, violenté, détruit, particulièrement ravagé et pollué du côté algérien, nigérien et libyen par l’exploitation minière (pétrole, gaz, uranium, or), miné par le trafic de drogue aux mains d’une mafia internationale, ce territoire à l’économie imbriquée entre nomades et sédentaires est devenu un terrain de chasse à l’homme pour armée et milices qui s’illustrent par des exactions d’une cruauté sans limite.
De quel syndrome souffre le Mali ? Est-ce celui du colonisé s’appropriant de façon mimétique le pouvoir, les manières et l’idéologie de l’ancien maître ? L’ex-puissance coloniale a toujours veillé à mettre en place des chefs d’État qui lui soient favorables, elle a fermé les yeux sur la corruption, la violence et la maltraitance qu’ils exerçaient contre leur peuple, pourvu que les intérêts français soient préservés. Cette culture de l’impunité a formaté les élites politiques du continent. Mais le lien entre l’ex-puissance coloniale et les nouveaux États est plus intime encore car de nature organique : il touche à la création et à la constitution même de ces entités politico-territoriales nées dans les années 1960, à leur mode d’organisation et de fonctionnement copié sur le centralisme français, à leurs frontières dessinés par l’avancée des troupes coloniales venant d’Alger ou de Dakar, à leurs institutions, à leur idéologie évolutionniste, à la méfiance si ce n’est à la peur héritées du temps de l’occupation coloniale, contre les groupes sociaux qui ont résisté à l’Empire (ce qui n’était d’ailleurs pas le cas de la région de Kidal). Voilà le paradoxe absolu de ces États et de leur personnel politique formé par et pour les intérêts d’une puissance extérieure.

La rhétorique coloniale fondée sur une vision raciale, ethnique et tribale de l’Afrique a été reprise intégralement par les autorités et la plupart des media maliens à chaque crise politique. Elle a conduit dans les périodes de conflit à une véritable obsession touarégophobe, amalgamant toute la population touareg dans un schéma de rébellion génétique. Cette propagande a dérivé en slogans prônant l’extermination de « l’ennemi de l’intérieur ». De nombreux appels au meurtre ont été ainsi relayés en toute impunité par la presse malienne et les réseaux sociaux, particulièrement actifs depuis 2012. [8] Quant aux membres de la société civile ou des partis politiques qui ont eu le courage de protester contre cette gestion mortifère des conflits, ils ont été menacés par le pouvoir et ses soutiens inconditionnels pour qu’ils se taisent.

L’État du Mali reste plus que jamais prisonnier de son héritage colonial. Sa pensée politique est calquée sur un modèle d’État à la fois centralisé et autoritaire, incapable de penser la diversité et de se construire en l’intégrant. L’armée nationale a repris contre les civils les pratiques sanguinaires de répression des corps de l’armée coloniale regroupés sous le nom de « Tirailleurs sénégalais » et a été conforté dans ces méthodes par la milice russe Wagner. Cette logique qui prône la violence plutôt que le dialogue n’a abouti jusqu’ici qu’à creuser les fractures entre les différentes composantes de la population. Dans ce contexte, l’instauration militaire de la « souveraineté de l’État sur l’ensemble du territoire national » est un leurre passager qui conduit plutôt à la dissolution du « pays » en tant qu’ensemble se reconnaissant comme tel. Ce n’est certainement pas l’inféodation à un nouveau maître qui changera le processus d’autodestruction du Mali – pas plus d’ailleurs que chez ses voisins sous la coupe de pouvoirs putschistes ou dictatoriaux –, tous engagés dans le chaos des représailles aveugles contre leurs populations, ouvrant ainsi la voie à l’expansion jihadiste.

HCH
15 novembre 2023

La source


[1] Pour ne citer que quelques exemples : 20 mai 1991 à Léré, exécution extrajudiciaire par l’armée de 50 Touaregs et Maures ; 14 mai 1992 à Gossi, 12 Touaregs travaillant pour une ONG norvégienne assassinés par la gendarmerie locale ; 21 avril 1994, environs de Menaka 4 à 12 civils touaregs exécutés (Amnesty International) ; du 12 au 29 juin 1994, à Tombouctou et aux environs, 455 victimes civiles nominalement identifiées (Enquêtes préliminaires regroupées sur les massacres de Tombouctou, Association des réfugiés victimes de la répression de l’Azawad, Nouakchott) ; 23 octobre 1994, Inelfis, 51 Touaregs massacrés par la milice Ganda Koy (’Bilan de I’attaque de Gao’, Ataram, n.d), etc.
Voir également la presse malienne : « Le lieutenant Abdoulaye Cissé dit Blo, le tueur de Ber, démasqué », L’Union, 19/7/94 ; « Tueries sauvages au Nord », L’Union du 5/8/94 ; « Horreur à la rwandaise », Le Républicain n° 100, 10/8/94.
Parmi les nombreux témoignages recueillis sur ces terribles années 1990, voir Touaregs. Voix solitaires sous l’horizon confisqué, Survival International, Ethnies-Documents 20-21, Paris, 1996, https://shs.hal.science/halshs-00293895/document

[2] Massacre de Moura, au moins 500 morts, voir https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/05/29/massacre-de-moura-au-mali-ce-que-l-on-sait-des-deux-militaires-sanctionnes-par-les-etats-unis_6175335_3212.html

[3] Notons que la presse internationale, sans aucune vigilance critique, appelle désormais « rebelles » de l’Azawad les signataires de l’Accord d’Alger.

[4] Selon Mondafrique (28/06/2023, https://mondafrique.com/decryptage/et-si-les-mercenaires-de-wagner-quittaient-le-mali/), les autorités de Bamako « verseraient chaque mois entre 7 et 9 milliards de Francs CFA, soit entre 7 et 9 millions d’euros. Au départ, comme en Centrafrique, Wagner devait se payer sur les ressources du pays et des mines devaient leur être attribuées, mais les négociations n’ont pas abouti ».

[5] La milice Wagner a été accusée par de nombreux témoignages d’actes de torture, de viols et d’exécutions sommaires en République centrafricaine, au Mali, en Ukraine, en Syrie. Son inscription sur la liste des organisations terroristes a été réclamée par Londres, et plus récemment par Paris. Voir Assemblée Nationale, résolution 111, 9 mai 2023 : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16t0111_texte-adopte-seance#

[6] Englobée en 2021 dans le Cadre stratégique permanent pour la paix, la sécurité et le développement (CSP-PSD)

[7] Il faut rajouter au surarmement de l’armée (voir http://news.abamako.com/h/261263.html) la contribution aérienne des juntes voisines (Niger, Burkina Faso) liées au Mali par un accord de défense signé le 16 septembre 2023 (Alliance des Etats du Sahel).

[8] Voir par exemple en 2012 (La Voix du Nord) : « Balayons toute présence nomade de nos villes et villages, de nos terres même incultes… Refoulons les nomades dans les sables de l’Azaouad… Organisez-vous, armez-vous, levons l’armée du peuple qui seule peut abattre l’ennemi ». Ou les commentaires relayés par Malijet : « S’il faut passer par l’exemple du Rwanda pour être unifier [sic] moi je suis partant et sans craindre la CPI [Cour Pénale Internationale] ou autres conneries du même genre » (signé dla8y, 06/04/2012) ; « J’ai la solution pour le problème touareg. Ouverture de fours crématoires pour les femmes touaregs enceintes » (signé Sekoubko, 1/02/2013).

Touaregs de Kidal : « NON AU MALI » !

Depuis vendredi 16 mai 2014, la situation sécuritaire s’est subitement dégradée à Kidal, la capitale de l’Azawad. L’arrivée du premier ministre malien dans la ville a été perçue par le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) comme une provocation. Le mouvement indépendantiste et les habitants de la ville ne veulent pas de cette visite qu’ils considèrent comme une offense. Point sur la situation.

Kidal1Tensions à Kidal

Samedi 17 mai 2014, quatre militaires maliens ont été tués dans de violents affrontements à Kidal avec le MNLA. Le mouvement touareg déplore, dans un communiqué, un seul blessé dans ses rangs. Il a également annoncé que le gouvernorat de Kidal est passé sous le contrôle des forces de l’Azawad ainsi que d’autres points stratégiques de la ville tel que la trésorerie et le commissariat central. Selon le MNLA, l’armée malienne a engagé samedi matin un assaut contre les mouvements de l’Azawad sur toutes les positions qu’ils occupent à Kidal, affirmant qu’il défendra ses positions et la population locale.
Les événements se sont accélérés depuis vendredi lorsque plusieurs centaines de personnes ont manifesté près de l’aéroport de la ville de Kidal pour protester contre la venue, prévue samedi, du premier ministre malien Moussa Mara, actuellement en tournée dans l’Azawad. Les manifestants s’opposaient à l’atterrissage de l’avion transportant une délégation des officiels maliens en prélude à l’arrivée du chef du gouvernement de l’Etat malieni. En réaction à ces manifestations pacifiques, les forces de l’armée malienne appuyées par celles de la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali) et de Serval [1] ont ouvert le feu sur les protestataires, provoquant vignt blessés, selon un bilan rendu public par le MNLA. Quatre manifestants ont été également arrêtés lors de ces violences. Dans un communiqué publié samedi, la Minusma évoquait un bilan de « 19 blessés légers » parmi ses policiers sur place et « sept parmi les manifestants ». Kidal2Arrivé à bord d’un hélicoptère de la Minusma dans le camp des Nations unies à Kidal, lepPremier ministre malien, persona non grata dans la région, s’est rendu ensuite au camp militaire tenu par les soldats maliens. Cette visite est contestée par le MNLA qui ne veut pas entendre parler de la présence d’une autorité malienne sur ses territoires. En novembre 2013, le précédent premier ministre, Oumar Tatam Ly, avait été contraint d’annuler une visite à Kidal après l’intrusion de manifestants hostiles à sa visite sur l’aéroport de cette ville.

MINUSMA, SERVAL : des forces d’occupation ?

Vendredi, la Minusma a dépassé la fonction qui lui a été assignée par l’ONU en s’en prenant sauvagement à des civils qui manifestaient pacifiquement à Kidal. Sur le site de l’ONU, on peut lire que la Minusma a été créée, le 25 avril 2013, « pour appuyer le processus politique au Mali et effectuer un certain nombre de tâches d’ordre sécuritaire. » L’une de ses missions est d’ »aider les autorités de transition maliennes à stabiliser le pays et à appliquer la feuille de route pour la transition en accordant une attention prioritaire aux principales agglomérations et aux axes de communication, en protégeant les civils, en surveillant la situation des droits de l’homme, en mettant en place les conditions indispensables à l’acheminement de l’aide humanitaire et au retour des déplacés, à l’extension de l’autorité de l’État et à la préparation d’élections libres, ouvertes à tous et pacifiques. »
Qu’une force internationale sensée « assurer, sans préjudice de la responsabilité des autorités de transition maliennes, la protection des civils immédiatement menacés de violences physiques, dans la limite de ses moyens et dans ses zones de déploiement« , agresse les civils qu’elle prétend protéger, est inacceptable. La Minusma a tourné le dos à sa mission, a violé son mandat et s’est rendue complice des autorités de Bamako.

Au lieu d’user de la force contre des civils désarmés, la Minusma aurait dû « surveiller toutes atteintes ou violations concernant les droits de l’homme » comme le prévoit son mandat.
Kidal3
Cette agression nous rappelle celle survenue le 15 septembre 2013 à Kidal. En effet, l’armée française s’était attaquée à des femmes et à des enfants qui manifestaient pacifiquement contre l’armée malienne dans cette ville.

Libération

La Minusma, Serval et l’armée d’occupation malienne doivent quitter l’Azawad. Les récents événements survenus dans la région prouvent qu’ils ont un seul objectif : détruire l’unité du peuple touareg, le priver de son droit à être souverain sur sa propre Terre et le soumettre à l’autorité du régime raciste et criminel de Bamako. Le départ de ces forces est d’une nécessité vitale pour la survie du peuple touareg. Il est plus urgent que jamais.

Tamilla Aït Ali & A. Azergui

Lu pour vous : Crise malienne | Mali – Ag Mohamed Assaleh : « J’annonce haut et fort ma dissidence du MNLA »

Ancien haut responsable du MNLA, Ibrahim Ag Mohamed Assaleh a définitivement rompu avec la rébellion touarègue. Il compte annoncer la création officielle de son propre mouvement à Alger d’ici à la mi-mars. Interview.

Ibrahim Ag Mohamed Assaleh, ancien chargé des relations extérieures du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), joue désormais sa propre partition dans les complexes négociations pour un accord de paix au Nord-Mali. Evincé de la rébellion touarègue à la fin du mois de février, sur fonds de profondes tensions avec son leader, Bilal Ag Acherif, l’ancien député de Bourem va annoncer, d’ici la mi-mars, la création officielle de sa propre organisation à Alger.

Soutenu par les autorités algériennes, ce futur « mouvement politico-militaire », selon les termes de son fondateur, entend enfin faire aboutir l’accord de paix avec le gouvernement malien. D’après Ibrahim Ag Mohamed Assaleh, cette nouvelle dissidence serait soutenu par une majorité des cadres du MNLA et compterait près de 8 000 combattants armés. De passage à Bamako, où il a officiellement informé les responsables maliens et ceux de la Minusma de sa démarche, le rebelle touareg a reçu Jeune Afrique pour expliquer ses objectifs.

>> Lire aussi : Algérie, Burkina, Maroc… Un médiateur peut en cacher deux autres

Jeune Afrique : pourquoi avez-vous définitivement claqué la porte du MNLA ?

Ibrahim Ag Mohamed Assaleh : Car je constate qu’avec Bilal Ag Acherif nous resterons dans une situation de « ni paix ni guerre », alors qu’il faut savoir faire la guerre, mais aussi la paix, quand cela est nécessaire.

Que lui reprochez-vous ?

De vouloir instrumentaliser le combat légitime du peuple de l’Azawad au profit d’autres agendas, notamment ceux de certains États, qui ne correspondent pas aux nôtres.

C’est à dire ?

Je parle en particulier du conflit entre Rabat et Alger dans lequel nous ne devrions pas nous immiscer, en tant que peuple qui lutte pour son droit à vivre en toute liberté et en toute dignité sur son territoire.

Vous accusez donc Bilal Ag Achérif d’être trop proche des autorités marocaines

Ce n’est pas qu’il est trop proche de Rabat. Nous partageons notre frontière avec l’Algérie. S’il n’y avait pas eu la colonisation française, il n’y aurait pas de frontière entre l’Azawad et l’Algérie. Notre peuple est situé de part et d’autre de cette délimitation. Par contre, nous n’existons pas au Maroc.

Et vous, vous ne répondez pas aux intérêts algériens ?

Ecoutez, je suis très indépendant vis à vis des intérêts algériens et nous sommes autonomes dans notre lutte. Si vous pensez que je suis proche d’Alger, je vous réponds « oui, nous le sommes géographiquement et socialement ». La majeure partie du sud algérien est occupée par des Touaregs. Je pourrais même dire que je suis à 50% algérien.

Bilal Ag Acherif a-t-il officiellement sollicité une médiation marocaine dans les négociations actuelles entre les groupes armés du Nord du Mali et le gouvernement malien ?

Oui. Il a sollicité une médiation auprès du roi du Maroc. Au lieu de solliciter cette nouvelle médiation, alors que nous avons déjà celle de la Cédéao, grâce à laquelle nous avons signé l’accord de Ouagadougou, il faudrait accepter celle de l’Algérie. C’est un pays frère avec lequel nous partageons les mêmes communautés de chaque côté de la frontière.

Quel est l’objectif de votre dissidence ?

J’ai déclaré haut et fort la création de ma dissidence. J’ai écrit au représentant spécial des Nations unies et chef de la Minusma, M. Bert Koenders, pour l’en informer. Je lui ai fait savoir que nous ne répondions plus aux instances dirigées par Bilal Ag Acherif au sein du MNLA. Nous allons déclarer la création de ce mouvement politico-militaire dans les jours à venir, d’ici la mi-mars, à Alger. Il sera consacré à la défense des droits légitimes du peuple de l’Azawad dans le processus de négociations avec Bamako.

Combien de combattants armés comptera ce mouvement ?

Il est difficile de définir un nombre exact de combattants, car certains se sont prononcés et d’autres attendent notre déclaration officielle pour se prononcer. Mais je suis sûr et certain que nous compterons environ 8 000 hommes. Nous avons aussi l’adhésion de plus de 60% de la population azawadienne.

L’indépendance de l’Azawad n’est plus à l’ordre du jour à partir du moment où nous avons signé l’accord de Ouagadougou.

Comment va s’appeler cette dissidence ?

Son nom sera annoncé le moment venu et chacun l’entendra.

Entendez-vous participer à la relance du dialogue avec les autorités maliennes ?

L’indépendance de l’Azawad n’est plus à l’ordre du jour à partir du moment où nous avons signé le respect de l’intégrité territoriale du Mali dans l’accord de Ouagadougou. Nous allons nous battre pour qu’il y ait un contrat social entre l’Azawad et Bamako sur les aspects politico-institutionnels, sécuritaires, économiques, ou encore socio-culturels, afin d’aboutir à un accord de paix durable. Nous souhaitons des négociations à travers la communauté internationale, la Cédéao, et l’Algérie, pour pouvoir atteindre le maximum des aspirations du peuple de l’Azawad.

Cette nouvelle dissidence ne va-t-elle pas apporter encore plus de confusion dans les négociations de paix ?

Cette dissidence n’apportera pas de confusion parce que nous existerons sans le sigle du MNLA. Nous allons exister sous un autre nom, pour justement éviter toute confusion.

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Propos recueillis par Benjamin Roger, à Bamako

La SOURCE

POINT DE VUE : Où va l’Azawad ?

Tout laisse à croire que rien ne va plus depuis quelques mois dans l’Azawad. Plus d’un an après l’intervention française, le pays est moins sûr. Plusieurs dizaines de civils ont été tués courant des mois de janvier et février 2014 dans des circonstances pour le moins obscures. Les groupes djihadistes y font également leur retour. Le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), affaibli, est traversé par des courants rivaux aggravés par l’intervention marocaine et des réactions du régime d’Alger.

azawadInsécurité.

Depuis début janvier 2014, plus de cinquante civils touaregs ont été tués dans des attaques près de Gao et aux confins de l’Aïr. Les assaillants seraient des membres du MUJAO, le Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’ouest. Des sources touarègues accusent l’armée malienne d’être directement impliquée dans les tueries. Ces attaques surviennent alors que les groupes djihadistes, chassés par l’armée française de l’Azawad, entament leur retour et sèment déjà le chaos dans la région. Et ils le font savoir. Dans un article paru le 27 février 2014, le quotidien Le Monde écrit que “des familles qui ne comptaient pas parmi leurs soutiens ont dû quitter leurs villages. Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) mène par ailleurs depuis six mois une campagne d’assassinats ciblés contre ceux qui ont aidé l’armée française sur le sol malien, en particulier des cadres touareg du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA). Une dizaine de membres – ou des proches – du MNLA ont déjà été tués”.
Selon ce même quotidien, parmi tous les groupes djihadistes présents dans l’Azawad, c’est le groupe Ansar-Dine, dirigé par le chef touareg Iyad ag Ghali, qui a le vent en poupe. Il est le plus visible sur le terrain. Les cadres et membres de ce groupe auraient investi leur zone d’influence traditionnelle au nord de Kidal, près de la frontière algérienne. Le quotidien nous apprend qu’à Boughassa par exemple, depuis le début février, la population a été informée qu’elle devait afficher son soutien ou partir. A Abeybera, Ansar-Dine a décidé, début février, de faire circuler une police islamique et a procédé à la distribution d’argent à la population. A Tassissat, à 30 km au nord ouest de Abeybera, s’était tenue, courant de l’été 2013, la réunion d’AQMI déclenchant la campagne d’assassinat contre les “collaborateurs” des Français. Ce retour d’Ansar-Dine a été encouragé et initié par les services algériens. Début février, les services de renseignements français affirmaient avoir localisé le chef de ce groupe à Tinzaouatin [1] dans la région de Tamanrasset. Iyad s’y cacherait avec l’assentiment des services de renseignements algériens. Ce dernier, pour rappel, fait l’objet d’un mandat d’arrêt lancé par la justice malienne et figure depuis un an sur la liste noire des terroristes recherchés par les Etats-Unis.

La réactivation d’Iyad serait une conséquence directe de l’intervention marocaine dans le dossier de l’Azawad !

Le MNLA affaibli.

Il n’est pas interdit de mener une action diplomatique active en faveur de l’Azawad, mais il s’agit de la mener avec discernement et être en mesure de bien choisir ses alliés ainsi que ses partenaires. Avec le recul, la visite effectuée par le secrétaire général du MNLA et le porte-parole de ce même mouvement à Marrakech et leur rencontre avec Mohammed VI semble avoir précipité le mouvement sur une arène dont il ne maîtrise pas totalement les enjeux et les contours. Le MNLA a été totalement dépassé par les conséquences de son action “diplomatique”. En voulant jouer dans “la cour des grands”, le MNLA s’est fait piétiné et déchiqueté. L’audience (puisqu’elle est présentée comme telle par le palais royal) accordée par le roi de la monarchie alaouite aux deux chefs du MNLA n’a été d’aucun bénéfice pour le mouvement. Elle a juste permis à Rabat, qui espérait damer le pion à Alger dans le Sahel, à peser sur la politique du Mali dans la région et à inciter ce pays à retirer sa reconnaissance des séparatistes du Polisario. La récente visite de Mohamed VI à Bamako où il a été accueilli en “sauveur” vient confirmer que le MNLA n’était qu’un marchepied, un étrier pour les services marocains, rien de plus. Le MNLA, qui n’en a tiré aucun profit politique, a permis à la monarchie marocaine de revenir sur la scène africaine et de bousculer les agendas algériens dans la région, avec la bénédiction de la France. Il faut dire par ailleurs que la gestion des “aventures marocaines” d’Ag Achérif, sur le plan de la communication, laisse à désirer. Le MNLA n’a pas communiqué suffisamment sur cette visite. Il a même utilisé dans son propre communiqué, le même lexique d’un texte fade rendu public par le cabinet royal de Mohammed VI. Certaines images fournies par les chaînes marocaines sont plus éloquentes que le silence du MNLA.

Sur le front interne, le MNLA semble de plus en plus divisé. Certains de ses chefs, d’après des sources locales, s’accaparent tous les pouvoirs et décident sans se référer aux autres membres. D’ailleurs lors de la visite à Marrakech, les hauts cadres du MNLA n’étaient même pas au courant de la visite : ils ont appris la nouvelle par les médias. Des médias maliens ont fait état récemment de la parution d’un nouveau mouvement, celui de des Cavaliers de l’Azawad pour l’Azawad (MCAA). Il n’est pas exclu que d’autres mouvements puissent voir le jour dans les semaines à venir. Des cadres du MNLA s’étaient retirés du Mouvement et il est fort probable qu’ils s’aventurent dans la création de nouvelles organisations. Cet émiettement sonnerait le glas du MNLA et de son projet de l’Etat de l’Azawad.

Réactions algériennes.

L’Azawad est devenu, au fil des années, un terrain de luttes géopolitiques entre plusieurs Etats riverains dont les Etats algérien et marocain. La visite à Marrakech de Bilal Ag Chérif a été très difficile à digérer pour Alger qui compte désormais faire payer cher le prix de cet affront aux groupes touaregs. Le choix marocain a été fait suite à la contestation de la médiation algérienne par le MNLA qui a refusé de prendre part, le 19 janvier 2014, à des discussions parrainées par les autorités algériennes. En voulant s’échapper au “piège algérien”, le MNLA s’était précipité dans la souricière marocaine.

Réagissant à l’audience accordée au MNLA par Mohammed VI, les autorités algériennes ont d’abord réactivé Ansar-Dine et les groupes djihadistes qui leur sont liés dans la région. Les scissions au sein du MNLA semblent aussi être provoquées par l’instrumentalisation, par le DRS, de groupes touaregs rivaux et de clans tribaux qui s’entredéchirent pour contrôler le mouvement.

Récemment, le quotidien algérien Echorouk a rapporté que les autorités algériennes ont appelé tous les groupes touaregs à une “rencontre islamique de réconciliation au Mali”. De son côté, le site d’information H-Azawad [2] qui affirme qu’Alger a appelé tous les groupes actifs dans l’Azawad a créer un front commun pour faire barrage à l’intervention marocaine dans la région. Ag Achérif aurait rejeté cette initiative qui, selon des sources locales citées par ce site, risquerait de limiter sa liberté d’action.

Diplomatie.

Il est certain que les Etats de la région, notamment Alger et Rabat, sont très nuisibles au MNLA et à sa cause, celle de l’instauration de l’Etat de l’Azawad. Tous les deux s’opposent catégoriquement à ce projet qu’ils ne cautionneront jamais pour des raisons géopolitiques. Le but de ces deux Etats anti-amazighs est d’instrumentaliser les groupes touaregs et terroristes également pour étendre leur influence et placer leurs pions dans la région pour mieux la déstabiliser et la contrôler.

Les Touaregs ont certes de très vilains voisins. Ils ne peuvent pas les changer. C’est la triste réalité, mais c’est l’une des règles intangibles de la géopolitique. Il ne leur reste donc que leur intelligence et leurs armes, s’il le faut, pour se libérer. Et bien sûr beaucoup de diplomatie, la vraie, et de communication, une communication intense et qui doit rompre avec le bricolage et l’amateurisme.

A. Azergui

Images du charnier de Djébock.
Trois civiles ont été ligotés avant d’être sommairement exécutés par une unité de l’armée malienne près de Djébock, à45 km de Gao, le mercredi 19 février 2014.


Notes

[1] La ville de Tinzaouatine comprend deux parties ; une partie qui se trouve dans l’Azawad, une autre partie se trouve sur la partie du territoire contrôlée par l’Etat algérien. C’est dans la partie contrôlée par les autorités algériennes qu’Iyad ag Ghali aurait été localisé. C’est là qu’il aurait construit une maison.

[2] H-Azawad est un site d’information sur l’Azawad proche des services marocains.

« La communauté internationale oblige le Mali à négocier avec un groupe armé »

Le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, élu en août, doit rencontrer François Hollande, jeudi 5 décembre. Il a accordé un entretien au Monde, mardi, à Paris.

Vous êtes en France pour participer au sommet de l’Elysée sur l’Afrique, les 6 et 7 décembre. Tenir un tel sommet, à Paris en 2013, n’est-ce pas du néocolonialisme ?

Ibrahim Boubacar Keïta : Si c’était le cas, je ne serai pas là. Je ne crois pas non plus que cela soit l’intention de François Hollande que je connais depuis une trentaine d’années. Il y a des problèmes de sécurité en Afrique qui interpellent l’ensemble de la communauté internationale. La France agit en conformité avec sa vocation, sans aucune forme de paternalisme inacceptable, ni de néocolonialisme qui n’auraient aucune chance de prospérer aujourd’hui.

Voyez-vous une différence entre la politique africaine de François Hollande et celle de ses prédécesseurs ?

Je ne me lancerai pas dans des comparaisons, je n’ai pas connu ses prédécesseurs, sauf François Mitterrand. Mais je connais François Hollande et nous avons une relation amicale, fondée sur des valeurs. Tout le monde s’accorde à dire que les décisions qui ont été prises vont dans le bon sens. Il y a du respect et de l’écoute, j’y suis très sensible. En venant au sommet de l’Elysée, je n’ai pas l’impression de répondre à un oukase.

L’écoute respectueuse n’était pas là avant ?

Je ne sais pas, je n’étais pas là. Je note juste que je suis écouté avec respect et considération, nous pouvons échanger de tout, c’est important.

La France est intervenue au Mali et s’apprête à le faire en Centrafrique. Est-elle condamnée à jouer le rôle de gendarme de l’Afrique ?

Sûrement pas, mais la France a, hélas, des devoirs historiques. Quand on a fait un chemin ensemble, aussi douloureux qu’il ait pu être parfois, il en reste toujours quelque chose. La France, vis-à-vis de l’Afrique francophone, se sent un devoir qui est d’abord un devoir de solidarité. Nous sommes condamnés à cheminer ensemble.

A quoi va servir ce sommet de l’Elysée sur l’Afrique ?

D’abord, il a le mérite de se tenir, de rappeler que sans la paix et la sécurité, tout le reste est vain. Nous avons de vastes problèmes de développement, il faut presque tout reprendre de zéro. Nous devons d’abord stabiliser nos pays et résoudre la question de l’Etat-nation. Aujourd’hui, ce vivre-ensemble est remis en cause de façon brutale au Mali. Même si nous avons été préparés par des crises cycliques d’irrédentisme, nous ne comprenons pas l’acuité qu’elles ont prise, avec cette revendication d’indépendance qui n’est assumée que par une infime minorité de la communauté en question .

Considérez-vous que le Mali est un pays sous tutelle internationale et jusqu’à quand les forces étrangères ont-elles vocation à rester sur le territoire malien ?

Le Mali ne sera jamais un pays sous tutelle et je ne serai jamais un président fantoche. Ces troupes ont vocation à aider le Mali à recouvrer son intégrité territoriale et sa souveraineté. Nous assistons, hélas, à une situation où la présence de ces troupes a empêché le Mali de rétablir l’autorité de l’Etat à Kidal, alors qu’il l’a fait à Gao et à Tombouctou.

Pour quel motif ? Nous ne sommes pas naïfs, la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) est retournée à Kidal dans le sillage des troupes qui sont venues nous libérer. La libération s’est faite de manière conjointe jusqu’aux abords de Kidal, où là, on a bloqué les Maliens. Pourquoi ? Serions-nous des barbares d’une autre époque qui, une fois à Kidal, se mettraient à massacrer tout le monde ? L’armée malienne n’est pas une armée de soudards, surtout cette armée qui est aujourd’hui en refondation.

Je ne comprends pas que Kidal ait été une exception. Pour un ami de la France comme moi, j’assiste avec beaucoup de dépit à un reflux de l’enthousiasme envers la France dans la population malienne qui avait applaudi l’intervention française au début de l’année. Aujourd’hui, les Maliens s’interrogent.

Pensez-vous que la France a commis une erreur en nouant des contacts avec le MNLA ?

Ce sont plus que des contacts, je suis très bien informé. Je ne peux imputer cette doctrine à François Hollande car je note avec bonheur que ce comportement est en train de changer de manière drastique. Nous ne comprendrions pas qu’il en soit autrement. L’armée malienne, cantonnée dans un fortin, ne pouvait pas circuler dans Kidal, où il y a eu une épuration ethnique. Tous ceux avec la peau noire ont été priés de quitter la ville. Cela, on ne le dit pas.

Selon vous, la France n’a plus de contacts avec le MNLA ?

Je n’ai pas dit cela. Nous-mêmes avons des contacts avec le MNLA. Mais la tragédie de l’assassinat des deux journalistes de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, le 2 novembre, qui m’a révolté et ému au plus profond de mon être, nous amène à nous interroger. Claude et Ghislaine sortaient d’un entretien avec le maître de Kidal, Ambeiry ag-Ghissa. Leurs ravisseurs ont franchi quatre barrages et sont repartis en retraversant les mêmes barrages, on se pose forcément des questions.

Si l’armée malienne avait été là, libre de ses mouvements, je pense qu’il en aurait été autrement. Laisser croire qu’un soutien au MNLA peut conduire à résoudre des prises d’otages est d’une naïveté déconcertante. La communauté internationale nous oblige à négocier sur notre sol avec des gens qui ont pris des armes contre l’Etat. Je rappelle que nous sommes un pays indépendant. L’Etat malien est contraint de négocier avec un groupe armé qui s’en vante, dans quelle comedia dell’arte sommes-nous ?

Où en est l’enquête sur la mort des envoyés spéciaux de RFI ?

Nous sommes presque certains que l’homme qui a été désigné comme le grand ordonnateur de l’événement est bien le responsable de cette tragédie. Tantôt on le dit ancien de tel ou tel mouvement, tantôt on le dit membre d’Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI). L’enquête l’établira.

Vous avez été élu, sur la promesse d’une rupture avec l’ère de votre prédécesseur « ATT ». Or vous-même et plusieurs de vos ministres étaient déjà présents lors de la période antérieure. Où est la rupture ?

Elle est dans la façon de faire, les Maliens ne m’auraient jamais porté au pouvoir si j’avais eu la réputation de traîner des casseroles. Pendant la campagne, j’ai dit que certains auraient pu ouvrir une quincaillerie ! J’ai autour de moi des hommes et des femmes dont je connais l’intégrité et auxquels j’ai dit : aucune faille ne sera tolérée.

Charlotte Bozonnet (Journaliste au Monde)

Yves-Michel Riols (Journaliste au Monde)

Lemonde.fr, 5 déc 2013

Mali : des « centaines » de djihadistes arrivent dans le Nord

Des « centaines » de djihadistes venus du Soudan et du Sahara occidental, sont arrivés ce week-end dans le nord du Mali occupé par des islamistes armés pour se battre à leur côté dans la perspective de l’envoi dans la région d’une force armée étrangère, a appris l’AFP auprès de témoins. « Dans la région de Tombouctou (nord-ouest) et de Gao (nord-est), des centaines de djihadistes, essentiellement de nationalité soudanaise et d’origine sahraouie, sont venus en renfort pour faire face à une attaque des forces maliennes et ses alliés », a confirmé une source sécuritaire malienne.

Un habitant de Tombouctou a affirmé que « plus de 150 islamistes soudanais sont arrivés en quarante-huit heures » dans la ville. « Ils sont armés et ont expliqué qu’ils sont venus pour aider leurs frères musulmans contre les mécréants ». Une autre source proche d’une ONG, a confirmé l’arrivée à Tombouctou et sa région de Soudanais, mais aussi d’islamistes « d’autres nationalités ». Tombouctou est contrôlée par le groupe islamiste armé Ansar Dine (Défenseurs de l’islam) et Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI).

« ILS VEULENT LA GUERRE ? ON VA FAIRE LA GUERRE »

A Gao, « depuis vendredi, il y a de nouveaux islamistes qui viennent et se rendent à la police islamique » du Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) qui contrôle la ville, a déclaré un témoin. Il a affirmé avoir vu dix véhicules pick-up remplis d’hommes armés venir à la police islamique. Habib Ould Issouf, l’un des dirigeants du Mujao à Gao, originaire du Niger, a confirmé l’arrivée de ces islamistes étrangers. « Ils veulent la guerre ? On va faire la guerre. C’est pourquoi nos frères viennent de partout. Ils viennent des camps de Tindouf en Algérie, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, de partout », a-t-il affirmé.

Cette information a été « formellement » démentie lundi par la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), qui y voit une « intoxication » destinée à décourager une intervention armée internationale. « L’arrivée de convois de combattants djihadistes du Soudan et du Sahara occidental est une information archifausse. Nous démentons formellement », a déclaré à l’AFP Ibrahim Ag Mohamed Assaleh, l’un des responsables du MNLA vivant à Ouagadougou.

LE MNLA DÉMENT CET AFFLUX DE DJIHADISTES

« Nous reconnaissons qu’il y a depuis longtemps quelques Soudanais dans les forces du Mujao (Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest, l’un des groupes islamistes du Nord), dont l’un est au commissariat de Gao (l’une des grandes villes de la région) pour l’application de la charia », a-t-il seulement admis. Le MNLA, qui a lancé une offensive armée dans le nord du Mali en janvier, s’est ensuite allié aux différents groupes islamistes armés pour prendre les principales villes du nord, avant d’en être évincé par Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) et ses alliés.

L’arrivée de ces renforts survient après une réunion de haut niveau vendredi à Bamako rassemblant des représentants de l’ONU, de l’Union africaine (UA), de l’Union européenne (UE), de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), mais aussi de pays voisins comme l’Algérie et la Mauritanie. Cette rencontre « a donné l’occasion aux participants de s’unir dans la solidarité avec le peuple malien et de convenir avec l’Etat du Mali d’une mobilisation optimale en faveur (…) de l’unité nationale et de l’intégrité territoriale du Mali », selon une déclaration commune. Le texte ajoute qu’il a été demandé aux autorités maliennes de prendre « des mesures immédiates pour faciliter les efforts de la communauté internationale » en vue d’une intervention militaire pour reconquérir le Nord.

« URGENCE »

Une force armée de quelque 3 000 hommes venant de pays de la Cédéao est en préparation, avec l’aval de l’ONU et l’appui logistique de pays comme la France et les Etats-Unis, mais sa composition précise et son financement ne sont pas encore clairement fixés. L’armée malienne a subi une lourde défaite face à l’offensive lancée en janvier par les rebelles touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) alliés aux islamistes armés qui ont depuis pris le contrôle total du nord du Mali.

La chute du Nord aux mains des islamistes a été précipitée par un coup d’Etat militaire qui a renversé le 22 mars le président Amadou Toumani Touré. Les putschistes ont rendu le pouvoir à des autorités civiles de transition, mais restent influents à Bamako. Démoralisée et sous-équipée, l’armée malienne n’est pas en mesure de reprendre le Nord, où les islamistes imposent avec brutalité la charia (loi islamique), y commettant de nombreuses exactions : meurtres, lapidations, amputations, coups de fouets, destruction de monuments sacrés. Lors de la réunion de Bamako, le président malien par intérim Dioncounda Traoré a souligné « l’urgence » d’une intervention armée étrangère pour libérer le nord de son pays.

Le Monde et AFP | 21.10.2012

Mali: le djihad du « Barbu rouge »

Proche d’Al-Qaeda, Oumar Ould Hamaha est le chef d’état-major des islamistes armés au Nord-Mali. Francophone, bachelier, il prêche la guerre sainte au Sahel et au-delà.

MaliLe « Barbu rouge » fait peur. Il le sait et s’en délecte. Avec sa barbiche teinte au henné, sa kalachnikov en bandoulière et ses appels au djihad « sans fin et sans limite dans le monde », Oumar Ould Hamaha, 47 ans, est le plus mystérieux des chefs islamistes armés qui font régner la terreur dans le Nord malien.

Son visage est apparu au grand public le 1er avril dernier, lors de la prise de Tombouctou. Ce jour-là, perché sur un pick-up, il harangue la foule en français : « Nous nous battons au nom de l’islam et nous allons pratiquer la charia au Mali », martèle ce porte-parole autoproclamé d’Ansar ed-Dine (Défenseurs de la religion), un mouvement salafiste majoritairement touareg, lié à Al-Qaeda au Maghreb islamique (Aqmi). Depuis le mois d’août dernier, Ould Hamaha a gravi les échelons : il est désormais au Mali le chef d’état-major (commandant militaire) du Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), autre organisation terroriste satellite d’Aqmi. La mutation du personnage témoigne de l’étroite imbrication entre ces trois groupes djihadistes. « Ils agissent de manière conjointe, explique un observateur originaire du Nord malien. Aqmi, la maison mère, a tout d’abord dépêché Ould Hamaha auprès d’Iyad ag Ghali, leader d’Ansar ed-Dine, afin de rallier à sa cause des combattants issus des communautés touareg et arabe. Aujourd’hui, Oumar joue le même rôle au Mujao pour enrôler des recrues originaires de toute l’Afrique de l’Ouest. » Car le Mujao, révélé au grand jour dans le courant de l’année 2011, est en fait la « légion étrangère » d’Aqmi, chargée d’exporter le djihad dans les autres pays d’Afrique subsaharienne. Ce qui explique sans doute pourquoi Ould Hamaha a menacé d’attentats suicides les Etats qui soutiendraient une opération militaire de reconquête dans le Nord malien. Et l’objectif de cette internationale terroriste est bien d’instaurer un califat sur toute la zone sahélo-saharienne.

Mais qui est vraiment Oumar, ce chef de guerre que ses combattants surnomment « Hakka » pour sa dextérité à manier le fusil d’assaut AK 47 ? Oumar Ould Hamaha est né en 1965 à Bèr, localité perdue dans les sables, à l’est de Tombouctou. Il est issu d’une famille nombreuse de nomades berabiches (communauté arabe malienne). Son père est « goumier », c’est-à-dire chamelier, dans une unité mobile de l’armée. Dans les années 1980, Oumar fait ses études à Tombouctou, au collège, puis au lycée franco-arabe. Plusieurs de ses anciens camarades se souviennent d’un « élève brillant, très pieux mais qui s’intéressait à tout, notamment à la philosophie ». Le jeune homme, qui parle arabe, français et songhaï, décroche le baccalauréat en 1984, mais renonce à s’inscrire à l’université. Il choisit d’aller étudier le Coran dans une madrasa en Mauritanie. A son retour à Tombouctou, en 1990, c’est un autre homme, entièrement voué à l’islam. Il va d’ailleurs trouver l’imam de la grande mosquée de la ville aux 333 saints pour obtenir le droit d’y prêcher… Refus poli, mais ferme.

« Nous sommes prêts à mourir en martyrs »

A la même période, le Nord malien s’embrase : les Touareg et certains clans arabes se soulèvent contre Bamako. L’un des frères d’Ould Hamaha, Bakar, membre du Front islamique arabe de l’Azawad (Fiaa), est tué par l’armée malienne. Oumar, lui, disparaît dans la nature, afin d’échapper à la répression. C’est durant ces années de clandestinité qu’il verse dans le salafisme, au contact de prédicateurs pakistanais qui arpentent la région. A-t-il séjourné un temps en Afghanistan, « seul pays à avoir véritablement pratiqué l’islam, avec les talibans », selon lui ? Mystère. On retrouve sa trace au Sahel dans les années 2000. Il a rejoint Aqmi, comme lieutenant de Mokhtar Belmokhtar, émir de la brigade Al-Moulathimin (les Hommes au turban), qui s’enrichit grâce aux trafics et aux enlèvements d’Occidentaux. En 2010, « Hakka » figure parmi les principaux orateurs lors d’un rassemblement djihadiste tenu dans une zone montagneuse restée secrète, quelque part au Sahara. Une vidéo de cette réunion avait été diffusée sur Internet quelque temps plus tard par Al-Andalus, la « société de production » d’images d’Aqmi.

Selon plusieurs sources, c’est Belmokhtar qui aurait poussé, ces derniers mois, Ould Hamaha à la tête de la branche militaire du Mujao. Le groupe, qui compte plusieurs centaines de combattants aguerris, retient en otages trois ou quatre diplomates algériens (un doute subsiste sur l’exécution de l’un d’entre eux, annoncée le 2 septembre dernier). Ces derniers temps, le nouveau chef d’état-major sillonne le Nord malien, escorté par un petit détachement de véhicules 4 x 4. Un jour à Tombouctou, un autre à Douentza (dans le centre du pays), occupée depuis le 1er septembre, ou encore à Gao, que le Mujao a mise en couple réglée. Le « Barbu rouge » justifie au nom de la charia les atroces châtiments corporels infligés aux civils : flagellation pour les consommateurs d’alcool et de tabac, lapidation à mort pour un couple non marié, amputation de la main droite pour les voleurs, ainsi que du pied gauche pour les bandits de grand chemin…

Face à l’intervention militaire annoncée au Mali, Ould Hamaha promet « le sabre » aux « mauvais musulmans » et aux Occidentaux : « Nous sommes prêts à mourir en martyrs. » Funeste présage.

Par , publié le 04/10/2012

L’Express

 

Nord du Mali: les islamistes exécutent à Tombouctou un homme accusé de meurtre

Les islamistes armés qui contrôlent depuis plus de six mois le nord du Mali ont fusillé mardi en public à Tombouctou un homme accusé de meurtre, ont affirmé à l’AFP des témoins joints depuis Bamako.

« L’exécution s’est déroulée entre deux hôtels de la ville de Tombouctou » vers 17H30 locales et GMT, « j’ai vu l’homme tomber après les coups de feu », a déclaré à l’AFP un premier témoin.

L’exécution a été confirmée à l’AFP par un conseiller municipal de Tombouctou, qui en a également été témoin. Selon lui, une centaine de personnes ont assisté à la fusillade.

L’homme exécuté est un membre de la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) « qui avait tué par balle un pêcheur à 30 km de Tombouctou », a affirmé de son côté un troisième témoin, qui s’est identifié comme Bamoussa.

Ville mythique, Tombouctou est contrôlée depuis début avril par Ansar Dine (Défenseurs de l’islam) et Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), deux des groupes islamistes armés qui se partagent le vaste nord malien avec le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao).

Ces groupes jihadistes en ont évincé leurs ex-alliés du MNLA et ont commis depuis plusieurs exactions et violences au nom de leur interprétation rigoriste de la charia (loi islamique) dont ils prônent l’application dans tout le Mali.

Mardi également, selon des témoins, quatre habitants de Douentza, ville de la région de Mopti (centre) située à la limite du Nord, ont reçu chacun 40 coups de fouets par un responsable du Mujao, qui contrôle Douentza. La flagellation s’est déroulée devant « des centaines d’habitants », d’après un des témoins.

Un élu de la région, autre témoin, a précisé que les quatre hommes avaient été arrêtés la semaine dernière dans un débit clandestin de boissons. Le propriétaire, un chrétien, a fui la ville et était recherché par les islamistes, a-t-il indiqué.

Dans un rapport intitulé « Mali: Les groupes armés islamistes sèment la peur dans le Nord » publié fin septembre, l’organisation Human Rights Watch (HRW) a dénoncé les « graves abus à l’encontre des populations » commis dans ces régions par les salafistes.

« Les lapidations, les amputations et les flagellations sont devenues courantes dans une tentative évidente de forcer la population locale à adopter leur vision du monde. Pour imposer leur interprétation de la charia, ils ont également organisé une parodie de justice tragiquement cruelle et ont recruté et armé des enfants dont certains n’avaient que 12 ans », affirme HRW.

Le 10 septembre, cinq hommes accusés de vol ont été amputés, chacun d’une main et d’un pied, par le Mujao à Gao (nord-est).

Le 29 juillet, des membres d’Ansar Dine avaient lapidé à mort, en public, à Aguelhok (nord-est) un homme et une femme auxquels ils reprochaient d’avoir eu des enfants sans être mariés.

D’autres couples jugés « illégitimes », des hommes accusés d’avoir bu de l’alcool, de fumer, ou encore d’être des voleurs ou des violeurs ont aussi été fouettés en public par les islamistes dans plusieurs villes, notamment à Tombouctou où ils ont aussi détruit des tombeaux de saints musulmans vénérés par la population.

AFP

2/10/2012

Terrorisme / Mali : Iyad Ag Ghali, rebelle dans l’âme

Iyad Ag Ghali est Malien et âgé de 54 ans. Il est le chef d’Ansar Eddine.

Originaire de la région de Kidal, dans le nord du Mali, Iyad Ag Ghali est un Irayakan, de la grande famille des Ifoghas. C’est en Libye, pourtant, qu’il a fait ses armes au début des années 1980 : il a une petite vingtaine d’années quand il choisit de rejoindre la Légion islamique du colonel Kaddafi – le Mali, victime de sécheresses à répétition depuis 1969, n’a rien à lui offrir.

Légion islamique

Iyad Ag GHALI leader Ançar Dine Tombouctou

En Libye, Ag Ghali parvient à se faire remarquer. Il est envoyé au Liban pour combattre les phalanges chrétiennes puis, selon certaines sources, part faire le coup de feu au Tchad, dans le courant des années 1980, avant de rentrer au Mali quand le « Guide » prononce la dissolution de la Légion. Ag Ghali est déçu, mais trouve vite une autre cause à défendre en devenant l’une des principales figures de la rébellion touarègue : c’est lui qui, à la tête du Mouvement populaire pour la libération de l’Azawad (MPLA), donne l’assaut contre la ville de Ménaka, le 28 juin 1990. Six mois plus tard, les accords de Tamanrasset, signés sous le parrainage de l’Algérie, mettent fin aux affrontements, mais les rebelles en sortent profondément divisés. Ag Ghali fonde le Mouvement populaire de l’Azawad (MPA), qui rassemble les Touaregs les plus modérés ; il n’hésite pas à affronter ses anciens compagnons, quitte parfois à s’allier à l’armée malienne… Sa supériorité militaire ne fait plus aucun doute. À la fin des années 1990, il est, pour beaucoup de Maliens, celui qui a ramené la paix dans le Nord.

Progressivement, l’homme se radicalise au contact de prédicateurs pakistanais de la Jamaat al-Tabligh (« association pour la prédication »). Nous sommes en 1999, et Iyad Ag Ghali a changé : il ne serre plus la main des femmes, voile son épouse et passe le plus clair de son temps libre dans les mosquées. Surprenant ? Pas tant que ça. Cette radicalisation va de pair avec un fort sentiment antioccidental, lui-même affûté dans les camps d’entraînement libyens. En outre, la crise économique a poussé de nombreux Maliens, sédentaires aussi bien que nomades, dans les bras des religieux.

En 2003, Ag Ghali est donc acquis à la cause fondamentaliste, mais pas au jihadisme : il se dit hostile au terrorisme et aux attentats-suicides. Cet « état d’esprit » fait de lui l’intermédiaire idéal pour négocier la libération des otages retenus par les islamistes du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC). C’est ainsi qu’en août de la même année Bamako lui demande d’intercéder auprès d’Abou Zeid en faveur des touristes européens kidnappés en Algérie – ce qu’il fait avec succès. Trois ans plus tard, en mai 2006, la colère gronde une nouvelle fois dans le Nord-Mali. Les Touaregs reprochent aux autorités de ne pas avoir respecté leurs engagements. Ag Ghali rencontre le président Amadou Toumani Touré (ATT), mais les négociations tournent court. Il se rapproche alors d’Ibrahim Ag Bahanga, autre grande figure de l’irrédentisme touareg, mort en août 2011. L’Algérie s’en mêle à nouveau, obtient la signature de nouveaux accords de paix (les accords d’Alger, conclus en juillet 2006), et, comme lors du précédent soulèvement, Ag Ghali troque sa tenue de combattant contre celle d’homme de paix.

Ahmada Ag Bibi : le manoeuvrier

Ahmada Ag Bibi et Iyad Ag Ghali se connaissent depuis longtemps. Au début des années 1990 déjà, ils se côtoyaient au sein du Mouvement populaire de l’Azawad (MPA). Ag Bibi est un grand militant de la cause touarègue, mais cela ne l’empêche pas de tremper dans de plus obscures affaires et d’être lié aux négociations pour la libération d’otages occidentaux. Dans le carnet d’adresses de ce député, on retrouve tout à la fois des bandits, des trafiquants, des hommes politiques de Bamako ou d’Alger, et même des membres de plusieurs services de renseignements (il a été membre de la commission parlementaire Défense et Sécurité intérieure)… Il a été président du groupe parlementaire d’amitié Mali-Algérie et a accompagné, en novembre 2011, l’ancien colonel de l’armée française, Jean-Marc Gadoullet, venu négocier avec Abou Zeid la libération des otages d’Areva et de Vinci.
Quand le Nord se soulève de nouveau, en janvier dernier, Ag Bibi rejoint le MNLA, puis Ansar Eddine, tant par réalisme que par amitié envers « Iyad ». Il est peu attaché à la laïcité, mais croit, comme Alghabass Ag Intallah, le diplomate d’Ansar Eddine, dans la négociation, « aux solutions pacifiques », et pourrait de ce fait être l’homme du dialogue. « Seule l’Algérie peut jouer un rôle déterminant de médiateur entre les parties au conflit », estime-t-il.
Pour servir ses ambitions, il n’hésitera pas à se retourner contre ses « associés » actuels.

Exil

ATT, qui sait à quel point il peut lui être utile mais qui redoute son influence grandissante, le nomme conseiller consulaire à Djeddah (Arabie saoudite) en novembre 2007. Le chef de l’État tient autant à le remercier qu’à le couper de ses partisans. Mais l’exil est de courte durée : en 2010, les Saoudiens le soupçonnent d’être en contact avec des membres d’Al-Qaïda et l’expulsent. De retour au pays, il se sert à nouveau de son carnet d’adresses (qui s’est encore enrichi pendant l’épisode de Djeddah) pour négocier des libérations d’otages et se constituer une fortune personnelle. Son nom revient à plusieurs reprises lorsqu’il est question du sort des employés d’Areva enlevés au Niger en septembre 2010.

Fin 2011, le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) n’a pas encore de statuts officiels, mais Ag Ghali en revendique déjà la tête. En vain. Les cadres de la future rébellion ne tiennent pas à voir cet homme ombrageux envahir l’espace politique et médiatique. Ils le trouvent trop proche d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi, ex-GSPC) et le soupçonnent d’être lié à Alger. Ils ne lui ont pas pardonné non plus les combats fratricides des années 1990.

Mohamed Ag Najim, un autre vétéran de la Légion islamique qu’Ag Ghali déteste cordialement, lui est donc préféré. C’est un camouflet. Qu’à cela ne tienne. Il crée sa propre formation, Ansar Eddine. Sans doute espère-t-il provoquer la dislocation du MNLA, dont il connaît si bien les faiblesses. À la même époque, Ag Ghali doit également renoncer à devenir le successeur de l’aménokal (le chef traditionnel) des Ifoghas, le vieil Intallah Ag Attaher lui ayant préféré son fils, Alghabass Ag Intallah (lire portrait p. 32). Cette fois encore, l’amertume est forte, mais il ne peut pas se permettre d’affronter ouvertement le patriarche.

Mieux vaut composer et travailler main dans la main avec Ag Intallah, très respecté dans la région. Ag Ghali tient sa revanche en juin 2012. Le MNLA est moribond, et c’est avec Ansar Eddine que discute maintenant le médiateur de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), le président burkinabè Blaise Compaoré. L’ancien soldat de Kaddafi est désormais reconnu comme un acteur incontournable de la crise malienne… S’il prenait clairement ses distances avec les salafistes, comme l’y incitent les diplomates étrangers, il pourrait même devenir un allié. D’ailleurs, s’il estime qu’un affrontement direct avec Aqmi peut servir ses ambitions, il n’hésitera pas à se retourner contre ses « associés » actuels. Abou Zeid, Mokhtar Belmokhtar et Hamada Ould Mohamed Kheirou le savent mieux que personne.
Alghabass Ag Intallah : héritier et diplomate

À l’origine, Alghabass Ag Intallah n’a rien d’un chef de guerre. Député à l’Assemblée nationale, il est surtout le fils du puissant chef des Ifoghas et son successeur désigné – une lignée qui lui permet de bénéficier de nombreux contacts jusque dans le golfe Persique, notamment avec la famille royale qatarie. Lorsque éclate la rébellion touarègue, en janvier 2012, il se range d’abord aux côtés du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) – même s’il préconise toujours le dialogue avec Bamako -, puis rallie Ansar Eddine. Ag Intallah n’est pas un fanatique, et son choix est sans doute plus pragmatique – l’émiettement du MNLA est sans équivoque – qu’idéologique. Aujourd’hui, Ag Intallah est le visage politique d’Ansar Eddine, son ambassadeur. Celui qui est reçu par le médiateur de la crise, le président burkinabè Blaise Compaoré. Iyad Ag Ghali sait trop qu’il a intérêt à lier son sort à celui qui régnera un jour sur les Ifoghas.

Par L. Touchard, B. Ahmed, Ch. Ouazani

Source : Jeuneafrique.com

L’Algérie continue de soutenir les organisations narco-islamo-terroristes dans l’Azawad

Toumast Press n’a cessé et ne cessera d’alerter l’opinion nationale et internationale par rapport au machiavélisme du gouvernement Algérien dans l’Azawad. Après avoir créé de toute pièce les organisations narco-islamo-terroristes, l’Algérie continu à les supporter financièrement et militairement. Alors qu’il annonçait distribuer des médicaments et de la nourriture aux populations de Kidal, nos sources nous certifient n’avoir rien reçu.

L’un des grands changements de la révolution actuelle dans l’Azawad est que la communauté internationale voit de plus en plus l’Algérie comme un état exportateur de de terrorisme et de malheur dans l’Azawad.

Plusieurs chancelleries occidentales ont pris conscience que l’Algérie est véritablement le marionnettiste qui utilise ses poupées que son Al Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI), le Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO), et Ansar Adine. Mais pour des raisons politiques, ces chancelleries s’abstiennent de toute action pouvant compromettre leurs relations avec l’Algérie.

Comme annoncé par Mossa Ag Attaher, deux officiers supérieurs d’un pays voisin (Algérie) donnaient des conseils aux terroristes du MUJAO et d’AQMI avant que ceux-ci ne s’attaquent au Conseil Transitoire de l’Etat de l’Azawad (CTEA).

Ces conseils n’étant pas suffisants pour faire face à la prochaine offensive du MNLA contre les groupes terroristes, l’Algérie a dépêché sept (7) de ces ressortissants pour se rendre à Gao via Niamey au Niger. Nous n’avons pas besoin de signaler que ces ressortissants sont des agents secrets qui se rendent dans une ville dans laquelle sept (7) de leurs compatriotes avaient officiellement été enlevés.

Le Vendredi 13 Juillet 2012, nous signalions que sept (7) camions portant les insignes du Croissant Rouge Algérien ont traversé l’Azawad en direction de Gao pour officiellement ravitailler les populations Azawadiennes en vivres et en médicaments. Ce convoi Algérien avait été escorté par un groupe de terroristes du MUJAO dirigé par Oumar Ould Aldati.

Toumast Press a appelé 5 sources à Kidal qui nous confirmé qu’en effet un convoi du Croissant Rouge Algérien est arrivé dans la ville en compagnie de militaires Algériens. Les militaires Algériens et les « humanitaires » ont échangé pendant plusieurs jours avec les islamistes de circonstances d’Ansar Adine. Après ces échanges, la cargaison fut livrée à Ansar Adine. L’Algérie a ensuite fait courir la désinformation selon laquelle le centre de santé et les populations de Kidal avaient reçu des dons de l’Algérie.

Les chancelleries occidentales étant au courant de ce machiavélisme de l’Algérie, il est important que l’opinion nationale et internationale continue de le dénoncer afin que la communauté internationale mette la république bananière au banc des nations.

Par Acherif Ag Intakwa

Toumsat